Voeux de Monseigneur le Comte de Paris aux Français

Publié le par Lux

14 janvier 2006
Voeux de Monseigneur le Comte de Paris aux Français


Mes amis,

Notre monde est éclaté. L'illusion semble vouloir être une drogue apaisante pour conjurer le sort ... ainsi est-on gouverné. On tente de trouver un équilibre entre des forces centrifuges, tandis que notre civilisation forge lentement le chaos.

Avons-nous le courage d'inverser cette proposition afin de continuer à vivre, à vivre debout ?

La lutte des classes est dépassée, notre monde est à la veille d'un tournant de l'Histoire alors que nous subissons une lutte de civilisation. C'est vital. C'est passionnant.


Il y a ceux qui crient de peur, et qui sont tués pour leurs cris, et ceux qui sont silencieux par angoisse, et qui sont tués pour leurs silences.

On tend sous nos pieds un filet de protection pour nous éviter l'écrasement, mais nous y demeurons englués comme des oisillons empêtrés, tandis que d'autres se partagent notre terre et nos biens.


Si tu ne veux pas te battre, tu n'as rien à faire sur la terre de tes pères.

Mais peut-être faut-il te fournir la clef qui te permettra de te redresser, de retrouver, parmi tous les concepts éradiqués, la transcendance de ton être, comme les repérés perdus ou oubliés propres à ton identité ... chère France, chers Français d'aujourd'hui et de toujours.

Dois-je rappeler ici que dans le nom de la Gaule se trouve la racine du verbe libérer, le mot « Gal » en langue hébraïque. Ainsi la Gaule a eu vocation de libératrice, et la France, son héritière, n'a de réelle identité que dans cette dynamique et dans la réalisation de celle-ci. Mais la véritable liberté se construit en soi-même et elle s'arrête là où commence celle d'autrui.

Une main qui n'a pas appris à donner, un bras qui ne sait pas embrasser et une épaule qui ne sait pas consoler sont prêts à détruire, à tuer.

Il y a trente cinq ans, Mishima le poète, Mishima le samouraï mettait fin publiquement à sa vie, selon le rituel millénaire du « seppuku ».


Longtemps sa mort a ébranlé la conscience des occidentaux, de ceux du moins qui conservent une parcelle de mémoire pour la tradition de l'honneur. Ce sentiment d'étonnement révèle sans doute chez nombre d'Européens une nostalgie muette à l'égard de leur propre tradition. L'élan de sympathie pour Mishima a rejoint celui dont a bénéficié également Ernst Jünger, comme si l'on admirait par procuration chez ce Japonais, comme chez cet Allemand, ce que l'on n'ose comprendre pour soi et chez soi, et que l'on refuse.

Par delà le politiquement correct on peut en effet établir facilement un parallèle entre l'esprit du Bushido propre au samouraï et la chevalerie européenne, principalement française. Il existerait donc une nécessité de dépassement et de courage propre à l’espèce humaine.

En ce début de nouvelle année 2006, loin de moi l'idée d'imaginer que le pays que j'aime tant, la France, puisse en arriver à se faire « Harakiri » ... Or trop de conditions semblent être présentes pour l'y inviter.

Afin de rompre le charme d'une morosité qui recouvre d'une chape de plomb les peuples de France depuis les années soixante-dix pour se transmuter peu a peu en état dépressif en ce début de troisième millénaire, je voudrais formuler trois vœux, comme dans les contes de fées afin de conjurer le sort.

Lorsque je me trouvais à Paris en 1954, étudiant en sciences politiques, j'avais organisé pour quelques uns de mes condisciples, proches en amitié, un colloque où étaient réunis l'écrivain orthodoxe Virgile Georgiu, le Recteur de la Grande Mosquée de Paris, Si Hamza Boubakeur, père de l'actuel et un Rabin dont le nom m’échappe.

Durant tout une après-midi, à l'ombre de la mosquée, nous avons évoqué la Bible, les Evangiles, la Thora et le Coran. Nous avons relu des extraits d'écrits d'Aristote, d'Averroès ou de quelques autres comme saint Augustin. Nous souhaitions que ces échanges philosophiques et spirituels pussent demeurer imprégnés de ce respect mutuel de la part de chaque communauté religieuse, à l'exemple de ce que nous vivions en ces instants de paix.

Affirmer sa vérité avec force afin de ne pas vouloir l'imposer aux autres, exige une sérieuse mise à jour des axes fondamentaux de notre propre religion. Car l'œcuménisme concerne les « trois » enfants d'Abraham : les Juifs, les Chrétiens et les Musulmans.

Nos racines sont une.
Mais les voies de développement furent différentes et cette différence touche notre identité culturelle, spirituelle et vitale, fondement de notre identité sociale et politique. Et ce n’est pas forcement la même que celle de notre vis à vis.

Dans l'état de crise actuelle, encore larvée mais brûlante, qui donne la fièvre a nos banlieues, la laïcité et l'égalité des droits pour tout Français, constitue un premier rempart contre l'intolérance à condition que ces principes soient appliqués avec rigueur.

Je me permets donc de suggérer que les trois religions du Livre, les trois grandes religions monothéistes soient enseignées dans toutes les écoles comme fondement de notre civilisation méditerranéenne et occidentale, et que dans l'école laïque et obligatoire, une tenue correcte et si possible uniforme soit instaurée afin d'éviter tout foulard, voile ou signe extérieur d'appartenance religieuse. Les écoles privées confessionnelles étant là pour permettre ces exutoires. Un esprit de respect réciproque doit régner dans nos écoles.

Il y a quelques jours, j'ai reçu une lettre d'un couple âgé. Il ne comprenait plus ce qu'il était advenu en France. Face aux incivilités, disons pour parler français, face au manque de politesse, aux comportements grossiers, voire dangereux, ce couple avait perdu ses repères depuis « mai 68 ». Il se terrait et la peur le submergeait comme tant d'autres. Nous nous ressentons en effet délaissés face au pouvoir grandissant des sectes et des bandes claniques qui organisent à leur niveau le chaos. Nous sommes retournés en barbarie, l'innocence en moins.

Mais ceci n'est, à mon avis, que légère banquise recouvrant une autre réalité. Je veux rappeler la capacité des Français à se mobiliser pour défendre une juste cause, pour secourir un malheur. Malgré leurs défauts, en dépit de leurs peurs ou de leurs angoisses, les Français n'oublient pas la Fraternité. Saint Vincent de Paul, l'abbé Pierre sont bien de chez nous...
C'est pourquoi je formule un premier vœux : que le cœur des Français demeure toujours aussi vaste, généreux et courageux.

Et pourtant les Français en ce début de nouvelle ère souffrent : ils souffrent durement jusque dans leur chair. J'y vois deux raisons et tout d'abord un vide de gouvernance. Nous arrivons en effet à la fin d'une ère, à la fin de notre civilisation coutumière, et la mondialisation fragilise même l'édifice capitaliste qu'elle a voulu construire puis qu'elle tente d'étayer.

La mécanique lancée en mai 68 par les trotskystes puis par le « pouvoir gris » - projection et parade inventée par les intellectuels de l'époque issus des grandes écoles qui a engendré les rencontres de Davos - et les OPA sauvages qui s'en suivirent, ont propulsé un train fou que personne, si ce n'est une poignée de décideurs à l'échelon de la planète, ne sait et ne peut contrôler, si ce n'est à leur profit inéluctable pour leur propre survie. Mais de toute façon, ils ne peuvent plus l'arrêter.

C'est pourquoi nous avons tant de mal à redresser notre économie ; c'est pourquoi nous peinons à cautériser les plaies de la société française, à moins de modifier radicalement et drastiquement nos comportements comme nos modes de penser. Depuis trente ans nos gouvernants, il faut le reconnaître, ont tout essayé superficiellement même le pire, et tout a échoué sauf le pire.

Pourquoi ne pas reconnaître que nous nous sommes « plantés » économiquement et que nos gouvernants sont aux « idées absentes ». Alors essayons enfin de remettre du bon sens dans la gestion du pays et dans l'esprit de chacun.


Le fait de gouverner ?
Certains me demandent quel serait mon programme. On ne gouverne pas avec des recettes préfabriquées : celles-ci n’apporteront que des réponses partielles à des événements qui ne peuvent se nourrir de l’inaccompli et se multiplier. Si au contraire nous préférions nous calquer sur quelque idéologie que ce soit, il suffit de rappeler l’échec des totalitarismes et de constater les méfaits du capitalisme pur et dur pour écarter ces solutions.

Peut-être regardons-nous dans le mauvais sens, focalisant notre vue, notre intelligence sur la théorie, sur l'équation idéale pour gouverner, telles qu'elle sont enseignées dans les temples du savoir national administratif.

Or ces théorèmes sont faux dans leur principe car dans leurs prémices ils ont omis l'essentiel : les êtres humains.

J'en viens alors à la seconde raison de souffrances des Français. Dans toute construction politico économique l’impasse faite sur l'être humain n'amène que malheur, or notre humanité a une juste aspiration au bonheur. De nos jours nous devons nous battre pour que soit reconnue notre dignité, pour que chaque individu, chaque famille puisse avoir sa place au soleil.

Durant les nuits blanches de nos banlieues, nous avons reçu un rocker d'Aulnay sous Bois. Un être marginal si l'on reste dans le politiquement correct. Un être étonnant si l'on connaît son cœur, son parcours et son engagement pour un idéal chevaleresque. Il nous a parlé des jeunes et des grands frères, mais aussi des petits frères égarés. Il nous expliquait le besoin de reconnaissance de ces êtres confinés en leurs ghettos ; éducation inachevée ou inaccomplie, désir de vivre, de s'insérer dans la société afin de pouvoir faire leur preuve et d'être respecté parce que reconnu.

Je comprends d'autant plus la révolte de se sentir rejeté, parce que votre peau, parce que votre langage ou votre tenue. Je l'ai vécu. Un jour, un haut fonctionnaire m'a dit, pourquoi voulez-vous travailler et enlever le pain de la bouche d'un autre, vous êtes Prince et riche ... s'il avait su !

Par ailleurs chacun a découvert que la limitation légale de la durée du travail à 35 heures a engendré une cascade de suicides en France cette mesure n'a pas créé plus d'emplois.

Une fable de La Fontaine raconte qu'il ne faut pas tuer la poule aux œufs d'or. Les entreprises, quelque soit leur taille, sont celles qui génèrent des profits et donc des emplois potentiels. Plus on les ponctionne plus on appauvrit le pays. Redistribuer gratuitement cet argent n’a jamais enrichi quiconque, ni redonné sa propre estime à qui que ce soit.

Alors formulons un second vœu pour notre pays et pour vous, gens de France. Que nos gouvernants aient le courage d'une politique volontariste pour promouvoir le travail, pour le protéger d'une fiscalité ubuesque, en inventant un nouveau « colbertisme » intelligent et ponctuel. Peut-être ainsi éviterons nous la banqueroute annoncée de notre économie et de nos finances. Louis XVI fut guillotiné pour moins que cela !

« France, Fille Aînée de l'Église, te souviens-tu de ton Baptême ? »

Ainsi s'adressait Jean-Paul Il à la foule rassemblée au Bourget en 1980. Lorsque je vois aujourd'hui la tristesse grise sur le visage de mes compatriotes, lorsque je regarde les plis d'amertume sur les bouches de mes concitoyens ... quel mal nous a frappé ?

Au lendemain de la guerre de 40 et ce jusque dans les années 70, la France reconstruisait, la France inventait, la France applaudissait aux réussites technologiques, la France encouragerait notre volonté d'être et de gagner. Alors le chômage n'était que saisonnier. Même l'Europe nous semblait belle à nouveau puisque nous n'avions cessé de la bâtir ensemble depuis des temps immémoriaux avec le Benelux, avec l'Allemagne puis avec l'Italie et l'Espagne. La France voulait gagner. La France lançait son cocorico parfois bruyamment et nos voisins en étaient un peu agacés. Mais il ne faut pas nous en vouloir, nous ne sommes pas fondamentalement méchants : oui, la France avait une mission et elle s'y activait.


Tant que la relation entre gouvernants et gouvernés était active et solidaire, le sang circulait, les idées germaient et la France vivait. Du jour où les gouvernants se sont enfermés dans le château de leur à priori, les Français tels des plantes sans eau se sont étiolés : la dépression n'est pas loin.

A quand donc le référendum d'initiative populaire ?

Mais surtout on ne trompe pas les Français sur l'amour qu'on leur porte. Ce ne seront ni les sourires, ni les mains tendues dans les marchés qui y changeront quoique ce soit : s'il n'y a pas d'amour, cela ne sert à rien.

Souvenez-vous de Lady Di. Vilipendée, vouée aux gémonies et pourtant « Reine des Cœurs » ainsi qu’on l'appelait. Que faisait-elle de plus que son devoir de Princesse de Galles, tendre la main, embrasser, faire reposer une tête d'enfant sur une épaule. Mais il y avait autre chose qui se percevait. L'Amour. Pas l'amour du pouvoir, mais l'amour des gens.

A l'ENA, l'Amour ne s'enseigne pas. En politique ce mot n’est pas politiquement correct. C'est ainsi que les Français se sentent orphelins depuis trop longtemps.

Car la vraie politique, et ce sera mon dernier souhait, ne peut se développer, croître et embellir que si elle prend en considération l'Homme dans la plénitude de sa dignité et dans toutes les composantes qui concernent sa diversité.

Toutes les grandes civilisations ont disparu lorsque pouvoir et argent ont supplanté la nécessité vitale de la transcendance de chacun. Conscients des mutations nécessaires et inéluctables de notre époque, souhaitons que les Français aient le courage d'inverser les énergies de l'absurde. La France a une mission à accomplir en ce début de nouveau millénaire.

Au fil des siècles, des hommes et des femmes illustres ont surgi pour arracher notre pays à toutes sortes de périls. Souhaitons que la Providence continue de veiller sur la France.

Bonne année.

Paris ce 14 janvier 2006.

Henri Comte de Paris, Duc de France.

Publié dans Actualité nationale

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