La décentralisation

Publié le par Lux

 

INTRODUCTION:

L’homme est « un animal social ». Ce qui le spécifie c’est son appartenance à diverses communautés (famille, commune, quartier, ville, pays, province, entreprise, groupements professionnels, culturels, religieux, associations diverses...). Ces groupements sociaux, variés et hiérarchisés, situés entre l’individu isolé et la nation ,« le plus vaste cercle communautaire », sont appelés « corps intermédiaires ». Ils constituent une société organique. Sans eux l’homme se retrouve isolé, atomisé (société individualiste) ou massifié (société collectiviste). Vouloir décentraliser, c’est affirmer la légitime existence de ces communautés et vouloir redistribuer les pouvoirs selon les compétences et les responsabilités.

 

I.    LES ORIGINES DE L’IDEE DE DECENTRALISATION

 

Ø      De nombreux penseurs du XlXe siècle voient la nécessité d’une réelle décentralisation pour la France sortie garrottée de la Révolution et de l’Empire (Bonald, Villèle, Tocqueville,etc).

Ø      A la fin du siècle, Paul Boncour et Charles Maurras sont d’accord sur un point: la centralisation étouffe le pays réel. Mais ils s’opposent sur les moyens pour parvenir à décentraliser. Boncour pense que la République peut le faire. Maurras démontre que non.

Ø      Cf la brochure de Charles MAURRAS: « L’idée de décentralisation » de 1898.

 

II.  LA REPUBLIQUE ET LA CENTRALISATION

 

Ø      La République est incapable de décentraliser vraiment. C’est l’Etat républicain qui a voulu la centralisation, par idéologie et par intérêt.

 

1.     Centralisation par idéologie

Ø      Le citoyen étant  souverain, il ne doit plus y avoir d’intermédiaire entre lui et l’Etat. Cela l’empécherait de se fondre dans le « grand tout national » nécessaire à la réalisation de la « République Une et indivisible ». D’où la suppression des corps intermédiaires dont l’origine est la fameuse nuit du 4 août 1789:

 « Quelque avantage réel qu’ait perdu la noblesse dans cette triste nuit, ce ,n’est pas à elle, ce n’est pas au clergé non plus que l’on a fait le plus de mal. (...)La nuit du 4 août a ruiné surtout nos libertés collectives, libertés locales, libertés professionnelles, qui firent la gloire et la force des Français d’autrefois. »

Charles MAURRAS (Réflexions sur la Révolution française)

 

 

 

2.     Centralisation par intérêt

Ø      La République ne peut décentraliser sans danger pour elle-même, car il lui faut tenir l’électeur et même le former dans ses écoles.

Ø      La République ne peut décentraliser sans danger pour le pays. Des pouvoirs élus pourraient s’opposer à d’autres pouvoirs élus et conduire la France à l’éclatement.

 

III.       LA MONARCHIE ET LA DECENTRALISATION

1.     Sous l’Ancien Régime

Ø      La France était « hérissée de libertés ». La monarchie se contentait d’y introduire « le minimum d’ordre supérieur et nécessaire ». Quand l’intérêt du pays n’était pas en jeu, le souverain laissait les libertés s ’épanouir. Jusqu’à la Révolution, la France garde sa constitution fédérative. Les « républiques » se portaient bien sous le Roi.

 

2.     Ce que pourrait faire la Monarchie moderne

Ø      Libre du joug de l’élection, la monarchie héréditaire aurait le pouvoir de décentraliser. Elle y aurait aussi intérêt, toutes les tâches superflues nuisant au bon fonctionnement de l’Etat.

Ø      Il pourrait y avoir enfin un véritable dialogue entre le pouvoir central et les représentants des communautés régionales et professionnelles.

Ø      Chaque cadre territorial posséderait son administration et ses compétences. Une véritable élite pourrait se dégager des corps particuliers. Les représentants du roi serviraient d’arbitres en cas de conflit entre les corps intermédiaires.

Ø      Les assemblées régionales désigneraient des représentants auprès du souverain qui pourrait les consulter et entendre leurs conseils et propositions.

 

 

CONCLUSION

Ø      La décentralisation est une nécessité vitale pour le pays.

Ø      Elle suppose un préalable politique: l’existence à la tête de l’Etat d’un pouvoir indépendant naturellement respectueux des communautés naturelles, le Roi.


 


"Les libertés en bas"

 

Il n'y a point de vexations soit légales, soit illégales, que l'Administration française ne se trouve permises contre le contribuable et l'administré. Il n'est point d'insolences que n'osent les bureaux contre les citoyens. Un César anonyme et impersonnel, tout-puissant, mais irresponsable et inconscient s'applique à molester le Français depuis le berceau. Soit qu'il vive tout seul, soit qu'il veuille s'associer, le citoyen français est assuré de rencontrer à tous les pas de son chemin le César-État, le César-Bureau, qui lui impose ou lui propose soit ses directions avec ses prohibitions, soit ses marchandises avec ses subventions.

Non seulement l'État ennuie et tracasse le citoyen français mais il lui afflige des "commodités dangereuses". Il le sert en des cas où celui-ci devrait se servir lui-même. Il le déshabitue de la réflexion et de l'action personnelle. Ainsi l'État endort et atrophie chez le citoyen la fonction civique. Le citoyen devient ignorant, paresseux et lâche. Il perd le sens de l'esprit public.

 

Mais, ces besognes, il est vrai que l'État les fait mal, étant mal outillé pour le faire. Nos différentes communautés glissent : ainsi à une décadence profonde, où l'État lui-même les suit pauvre d'hommes, la France sera bientôt pauvre de tout.

 

-              Considérant que les âges de vraie et solide prospérité nationale furent, en France, ceux du Pouvoir royal, indépendant et maître des attributions propres de l'État, n'empêchait point les différents corps, compagnies et communautés de la nation de gérer librement leurs intérêts particuliers;

-              Le pouvoir royal ne peut désormais manquer de tendre, avec fermeté, quoique avec sagesse et moyennant les délais et précautions indispensables dans la pratique, à rétablir l'usage de ces libertés partout ù l'intérêt supérieur de la Patrie et de l'État n'exigera pas le déploiement de l'autorité.

 

C'est-à-dire que :

Les familles s'organiseront comme il leur plaira. On testera comme on voudra. Les pères qui voudront constituer à la suite de leurs descendants des biens héréditaires, incessibles et insaisissables, en auront toute liberté. Reconnues enfin pour des associations naturelles, les familles pourront acquérir des droits analogues à ceux des citoyens, posséder en commun un avoir honorifique et moral comme un avoir matériel.

                Les communes et les pays (ou arrondissements), par une suite de mesures libératrices prudemment sériées, deviendront maîtres de régler selon leur gré leurs affaires propres, disposant de leur ordre intérieur sans intervention de l'État, décidant des affaires qui sont familières ou qui peuvent l'être à chacun de leurs membres et n'étant bornés, dans cette honnête et raisonnable liberté, que par le bien commun et la sûreté du royaume.


 

                Ces vastes régions qui s'étendent autour de nos grandes villes (Lyon, Bordeaux, Marseille, Lille, Nancy, Toulouse, Rouen, Montpellier, Grenoble, Besançon, Limoges, Clermont, etc.) seront reconnues par la loi et délivrées du sectionnement départemental, qui est absurde et anarchique; les territoires agglomérés autour de ces capitales naturelles obtiendront progressivement l'autonomie, en tout ce qui touche leurs affaires particulières, ans engager l'intérêt national; de grands conseils provinciaux, sous le contrôle, supérieur mais éloigné, de l'Etat, concourront au réveil et à la renaissance du corps entier de la patrie que la politique jacobine a diminué.

                Les associations professionnelles, confessionnelles et morales, jouissant de la plus complète liberté, seront soumises au droit commun, et considérées comme des personnes civiles autonomes, faisant leur police elles-mêmes par cet esprit de corps qui est le principe de tous les progrès; elles seront capables de posséder, d'acquérir, d'aliéner, d'acquitter des impôts, de payer des amendes et d'être même, en cas d'indignité légale, retranchées de la vie commune à temps ou à perpétuité.

 

Au résumé, le citoyen, dans toute la sphère où il est compétent et intéressé directement, dans tout ce qu'il a le pouvoir de connaître et donc de juger, est présentement un esclave. Le pouvoir royal lui rendra la disposition et le souveraineté de ce domaine qui lui fut arraché sans droit, sans utilité, et au péril même de la force de la patrie.

 

Voilà ce que fera le roi pour les libertés. Il les rendra aux citoyens. Il en sera le garant, le défenseur et le gendarme. Examinons ce qu'il fera pour l'autorité, ainsi chassée du détail intérieur de la vie civile.

 

"L'autorité, en haut"

 

Il la relèvera, la définira, l'utilisera pour des fins purement nationales.

L'État français qui se mêle de tout aujourd'hui, même de faire des écoles et de vendre des allumettes, et qui, en conséquence, fait tout infiniment mal, vendant des allumettes ininflammables et distribuant un enseignement insensé, l'État est lui-même impuissant à remplir sa fonction d'État."

 

Charles MAURRAS, Petit manuel de l'enquête sur la Monarchie

Publié dans Formation politique

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article